Trois hommes à la Chope

Il était tôt et ils avaient croisé peu de villageois, c'est donc en toute quiétude que le trio rejoignit l'auberge qu'un garde leur avait indiquée. Le bâtiment semblait relativement bien tenu et c'est avec un plaisir non feint que Roland se préparait à trouver le réconfort d'un repas chaud et d'un bon pichet de vin après quelques jours de marche. Il attendit que François l'aide à quitter son encombrante armure avant d'installer sa monture aux écuries et d'attendre que son compagnon soit prêt, perdu dans ses pensées avant d'en émerger en souriant.

"Mes amis, je crois bien que je commence à avoir le mal du pays. En tout cas, j'espère que ces contrées nous offrirons autant d'aventures que de d'avenantes donzelles. Puisse la Dame guider nos pas."

Il entra ensuite dans la salle principale et s'attabla.

François laissa son sire le précéder. Il ne fit aucune remarque sur les donzelles, il savait déceler les piques de son ami. Entrant dans la salle il fut tres heureux de gouter à la chaleur ambiante. Ses os déjà plus tout jeunes, quoique toujours robustes, ne s'en portaient pas plus mal.
Il attrapa une chaise et s'attabla avec les deux autres compagnons. Il était curieux de voir quelle folie allait surement germer dans le cerveau d'artise du ménestrel. Toutefois, il préférait d'abord avoir quelque chose à manger:

Hola l'aubergiste! Trois pintes et trois repas!

Habitué à peu, il ne précisa pas la qualité requise. Ce genre de considérations ne lui venaient que tres rarement à l'esprit.

Puis il repris en bretonnien cette fois

Le mal du pays mon sire? Mais peut etre pourrions nous y retourner sous peu. Pourquoi ne pas nous mettre en route dés demain? La route et longue et il parrait que les frontieres nécessitent quelques bras puissants pour les défendre.

@Cordelia


L'aubergiste t'apporte au bout de quelques minutes un repas chaud dont le fumet t'inspire plus que ton appétit ne t'en aurait suggéré. Tu commences à manger tranquillement.

Au bout d'un moment, le bretonnien qui te semble être un moine se tourne vers toi, et dans un reikspiel teinté d'accent bretonnien interrompt ta dégustation:

Veuillez pardonner cette interruption , gente dame, mais il ne me semble point convenable et charitable que de laisser une jeune personne manger seule alors que notre table peut l'accueillir sans en souffrir le moindre désagrément, et bien au contraire. Daigneriez vous honorez notre piètre compagnie de votre présence?

Roland répondit à son compagnon dans leur langue natale.

"Ne fais-tu donc plus confiance à nos frères pour vaincre nos ennemis? Non mon ami, des braves gardent nos terres et je doute qu'ils défaillent. C'est dans ce "royaume" dépourvu de la protection de la Dame que le malin a frappé et frappe encore. Je gage que nous y sommes plus utiles aux fins de la Dame."

Il attendit ensuite d'être servi et adressa un drôle de clin d'oeil à Jocelin lorsque le "moine" invita la jeune femme.

Jocelin parcouru le chemin jusqu'à l'auberge perdu dans ses pensées; il ressassait encore le souvenir du mauvais accueil de ces "bouseux". Décidément, son art n'était pas reconnu à sa juste valeur par ici.

Il suivit Roland et François à l'auberge le sourire aux lèvres. La perspective d'un bon repas et d'un bon lit l'enchantait. Il écouta leur conversation, un brin amusé mais sans mot dire. Il parut soulagé d'entendre son maître dire qu'ils n'iraient pas à la bataille, n'ayant aucune envie de se faire occire.

Lorsque l'écuyer proposa à une charmante jeune fille de se joindre à eux, Jocelin rectifia sa position un brin avachie et se dit qu'il aurait peut-être une chance avec cette donzelle, même s'il n'y crut pas vraiment.

La jeune femme savourait en silence à la fois son ragout et la chaleur confortable de l'âtre qui ronflait non loin. Ce repas et cette bière avaient sérieusement entamé son préjugé sur la cuisine Wissenlander.
Elle n'avait jeté qu'un bref regard de passage à la table voisine, notant simplement qu'ils étaient richement vétus, et conversaient dans une langue qu'elle ne connaissait pas. Du bretonnien, peut-être ?
Aussi, fut-elle surprise de l'invitation d'un de ces hommes, celui qui arborait un air d'ecclesiastique. La vue de la croix gothique, puis du surcôt frappé d'héraldique de son voisin, lui coupa d'autant plus le souffle. Des chevaliers ! Elle remarqua aussi le jeune homme à leur coté. Sa mise désignait un ménestrel ; qu'il soit directement attablé avec ces deux nobles en faisait aussi quelqu'un d'important.
"Messire, c'est avec joie que... la modeste jeune femme que je suis accepte l'invitation d'aussi.... augustes personnes ! "fit elle en esquissant une révérence. "Pourriez vous me faire l'insigne honneur de ... m'indiquer votre identité ?"Elle essayait de s'exprimer dans le meilleur reikspiel qui soit, sans guère de succès. La vie des champs et des routes n'apprend guère les bonnes manières et les subtilités de la langue châtiée

Après un bref regard à son maître pour avoir son approbation, Jocelin se leva. Paraissant soudain plus grand qu’il ne l’était et bien plus séduisant, il se racla la gorge et déclama:

Si fait, charmante jeune demoiselle,
A l’iris si clair et à la chevelure si belle,
En quelques vers vais vous présenter,
Les nobles compagnons ici attablés.

Aux armoiries parées d’un lys et d’une rose,
Courageux défenseur des justes causes,
A l’œil d’azur et aux cheveux de miel,
Le Chevalier Roland de Brienne le Castel.

A la poitrine ornée d’une Sainte Croix,
L’esprit si droit que l’on en reste coi,
Sous sa toison cendrée luit un regard perçant,
Voici le frère François-Louis de Saint-Armand.

Permettez un mot sur votre humble serviteur,
Dont l’art de la rime inspire rires ou pleurs,
Jocelin de Blancafort, tel est mon nom,
Et tous trois de Bretonnie nous venons.

Il se fendit alors d’une profonde révérence et reprit sa place. Il était assez fier de lui et espérait ainsi avoir marqué un point avec cette jolie jeune femme.

La jeune femme se mit à rire franchement.
"Messires, voilà une bien belle coutume de se présenter en rimes. Vous m'excuserez, je l'espère, mais je ne puis guère faire de même !
Je me nommes Cordélia Hoefer, simple roturière, et cochère à la recherche d'emploi. Vous venz de Bretonnie, à ce que je crus comprendre ? Quelles raisons ont bien pu vous éloigner de vos verdoyantes contrées ? Et surtout pour vous, messire de Saint-Amand, de rejoindre un ordre de templier impérial ?"

HRP : message édité ^^.

François fit un sourire laissant paraître les marques que le temps avait imprimé sur son visage.

Quelles raisons meine Dame? Simplement une jeunesse dissolue et un besoin de servir une cause bien plus grande que moi pour racheter mon âme. Je travaille depuis de temps à défendre de toutes mes forces ce que l'empire à de plus cher: ses gens et ses terres. Pour moi il n'y a rien de plus important, et ma vie ne passe qu'apres cela.

Trinquons ma chere!

François approcha sa chope de celle de la demoiselle.

"Au delà du trépas !" trinqua à l'hochlandaise Cordélia." Une telle foi et un tel engagement vous honore, messire. Nos terres sont peut être vastes et nos gens vaillants, mais d'hardis fervêtus ne sont jamais de trop !"Elle se tourne vers les deux autres convives.
"quand à vous, appartenez vous aussi à cette ordre ?"

Roland ne put s'empêcher de sourire étrangement en entendant son ami réaffirmer sa totale dévotion à un homme, un héros certes, mais un héros mort depuis une éternité et déifié par une bande de vilains en mal de reconnaissance.

"Au delà du trépas! Et soyez la bienvenue parmi nous."

Le chevalier leva son verre et trinqua avec chacun. Il but une gorgée avant de répondre à son interlocutrice, amusé par l'idée qu'il puisse servir Sigmar.

"Non ma dame, je n'ai pas cette prétention. Ma lame est au service d'autres maistres bien peu enclins à partager : ma Dame et mon roy. Mais, qui sait, peut-être aurais-je un jour l'insigne bonheur de pouvoir servir si charmante dame que vous.

Il ponctua son intervention d'un clin d'oeil et but une gorgée en son honneur.

Jocelin trinqua avec les autres. Cette boisson était la bienvenue, car il avait la gorge un peu sèche. Sans doute était-ce dû à la présence de cette jolie jeune femme...

Il attendit que son maitre ait terminé pour répondre lui aussi à la question de Cordélia.

- Pour ma part, je ne suis que l'humble héraut du Seigneur de Brienne le Castel. Je fais de mon mieux pour faire connaître ses exploits et ceux du Templier qui l'accompagne partout où nous passons. J'écris également une geste en son honneur et agrémente nos soirées avec de la musique.

Il sourit à leur interlocutrice et, un peu gêné, planta son regard dans son verre, afin d'éviter de trop rougir.

Rougissant quelque peu au compliment de Roland -qu'est ce qu'un gentilhomme peut bien me me trouver ? se demanda-t-elle-, elle profita de la remarque ménestrel pour rebondir.
"Vraiment ? Au vu de votre déclamation de de tout à l'heure, cela devrait faire une superbe ballade ! Sans oublier vos exploits eux-même, messire, qui je suppose ont du être nombreux et épiques... Sans vouloir trop vous en demander, pourriez vous, cher Jocelyn, nous en faire en entendre un court extrait ?"

Jocelin fut un peu pris au dépourvu par la demande de Cordélia. Il baffouilla:

- C'est que...je ne puis vous lire un texte qui n'est pas terminé. Il y aura certainement des rajouts, des corrections...et je n'en suis pas entièrement satisfait non plus.

Reprenant un peu contenance, il ajouta:

- Mais par contre, je vous chanterai volontiers une ou deux ballades après le repas.

Il sourit en attendant la réponse de la jeune femme.

La réponse de Cordélia gonfla Jocelin d'orgueil. Enfin un compliment! Décidément, cette soirée s'annonçait encore meilleure qu'il ne l'avait espéré en arrivant dans cette auberge.

- Je vous remercie, dame Hoefer. En effet, les chansons bretonniennes sont agréables à l'oreille. Je me ferai d'ailleurs un plaisir d'en traduire pour vous les paroles.

Il s'inclina devant Cordélia et but une gorgée.

La jeune resta un moment silencieuse aussi, le temps de finir son assiette.
"Au fait, avez vous l'intention de repartir de sitôt, ou de rester quelques temps ici ?"demanda t-elle aux trois hommes.

Roland se surprit à contempler son verre vide l'air quelque peu attristé avant de se reprendre.

"A dire vrai, tout dépend de ce que ces contrées ont à nous offrir. Malgré ces histoires de créatures hantant vos forêts et la menace des gens du nord, nous n'avons pu apporter qu'une maigre contribution à la défense de vos terres. Seul le temps nous dira de quoi demain sera fait mais que diriez-vous de partager notre compagnie pour la nuit? Je suis sûr que Jocelin prendra plaisir à vous conter quelques-unes de nos plus belles ballades."

Le chevalier adressa alors un clin d'oeil à son compagnon et fit signe à l'aubergiste afin qu'il leur serve à boire.

"Rien ne me fera plus plaisir que de passer la soirée avec vous, messieurs." Quand à mon lendemain, pensa-t-elle, je sais déjà ce que cela va être : économiser pour pouvoir s'offrir une nouvelle monture, et pouvoir ainsi me présenter comme escorteuse auprès de caravanes marchandes...

Jocelin acquiesça en souriant à la demande de son maître puis écouta attentivement les paroles de Cordélia avant de lui répondre:

- Ce doit être dangereux! Défendre les caravanes des attaques de brigands...Je suis très impressionné qu'une femme ait pu choisir pareille profession. Vous devez être habile au combat, Dame Hoefer.

Il attendit, véritablement intéressé, ce qu'allait répondre la cochère.

"-Habile au combat ? Vous me surestimez... A dire vrai, je préfères maintenir l'adversaire au loin. "Elle tapota sur son tromblon ." Quand à l'épée, disons que je sais me défendre quand le besoin s'en fait sentir, guère plus. Je ne suis point fervêtu ou diestro." Le dernier mot, teinté d'un accent très pur de tiléen, teintait ce terme estalien d'un léger mépris digne d'un natif de Miragliano.
"J'avoues qu'un emploi moins agité, comme juste conduire une coche et à m'occuper des chevaux, me tenterai beaucoup. Mais, vous avez du malheureusement le constater, même ainsi, on doit bien trop souvent faire siffler les lames et faire couler le sang... "
Elle remit machinalement une mèche de ses cheveux blonds derrière ses oreilles, revélant une profonde et ancienne cicatrice sur le coté droit de son cou.

Roland ne pu retenir une mauvaise grimace lorsque la jeune femme leur montre son tromblon. Le moins que l'on puisse dire étant qu'il désapprouve l'usage de telles "armes" que la maudite piétaille de ce pays semblait tant affectionner. Il se garda cependant de tous commentaires.

"Voilà une bien vilaine cicatrice sur un si joli minois. Mais nous ne savons que trop bien à quel point le sang doit parfois couler pour châtier quelques mécréants. Serait-ce par trop discourtois de vous demander quel impudent a pu vous infliger pareille blessure?

La question déstabilisa quelque peu la jeune femme.
"C'est... ce...cette... cicatrice ? Des... hommes-bêtes..." elle cracha ce nom honnis "... Ils ont failli m'avoir... J'ai de la chance d'être encore en vie. Ce gor a failli me tuer ! saleté de monstre ! Il m'a presque égorgé, et il... il ... a tué mon seigneur... et Hans... et Frédérico...IL A FAILLI ME TUER !" La jeune femme resta prostrée quelques instants, en larmes, le visage complétement hanté.
Puis elle revint à elle, et pris d'une voix froide, distante, qui contrastait avec sa crise précédente. "La première fois que je quittais mon village. Je devais conduire mon seigneur et son fils à Altdorf, car ce dernier pouvait être un Sorcier. Peu avant la capitale, notre escorte a été attaqué en plein jour par ces horreurs... Nous étions quinze, sans compter mon graf et son fils Niedrich. Seuls lui et moi avons réussi, Sigmar sais comment, à nous en être tiré. C'est depuis ce sinistre jour que je suis sur les routes.
Veuillez m'excuser pour ces pleurs, vous comprendrez que... ces souvenirs me sont quelques peu pénibles.

Jocelin fut très impressionné par la réaction imprévisible de Cordélia. Elle lui fit même très peur et il se fit tout petit sur son siège.

En écoutant l'histoire, le ménestrel pris la jeune femme en pitié. Ce devait être tellement dur de vivre pareil cauchemard. Son regard se tinta de compassion et de tristesse, mais il ne sut que dire pour la rassurer.

Sa rencontre avec les créatures du malin avaient de toute évidence marquée la jeune femme au plus profond d'elle-même. Roland se garda de tous commentaires concernant le fait qu'une femme n'exerce un métier d'homme, pour ce qu'il avait pu en constater, les routes de l'Empire sont peu sûres et y voyager s'avère parfois suffisamment dangereuses pour un homme en arme, alors pour une femme... . Même avec l'une de ces bouches à feu qui abat pourtant si facilement les plus braves, où donc les impérieux peuvent-ils avoir la tête?!?

Le chevalier se contenta donc de grimacer , se découvrant tout de même quelque sympathie pour Cordélia alors que tant de paysans rechignent à prendre les armes.

"Vous me voyez fort gêné de ne pouvoir venger la mort de votre seigneur, nous avons tous perdus des proches contre cette cruelle engeance et puis donc aisément pardonner vos pleurs. Mais il n'est pas encore l'heure de châtier et bêtes. "

Il but sa choppe d'une traite et s'essuya la bouche du coude avant de se tourner vers le ménestrel.

"Jocelin, aurais-tu la gentillesse de bien vouloir jouer l'une de nos belles ballades à notre hôte? Je suis sûr qu'elle appréciera tes talents au moins autant que le fait de ne plus aborder ce triste sujet."

Roland prit ensuite un broc de vin et servit ses compagnons de tablée.